Devenir Educateur canin, ce que ça implique 

Aujourd’hui, je découvre toutes les semaines ou presque qu’un nouvel éducateur canin s’installe dans ma région. Je reçois également beaucoup de demandes de stage. C’est très bien. C’est un beau métier. Un véritable métier de passion. Et de la passion et de l’investissement, il vous en faudra si vous décidez de vous lancer dans cette voie. Car le fait de voir des entreprises naître un peu partout montre à la fois à quel point ce métier plait et peut prospérer et à la fois avec quelle facilité on peut le devenir – cela soulève des questions-.
Dans cet article, je voudrais vous partager mon point de vue et mon ressenti après presque quatre belles années d’installation, en appuyant sur les aspects négatifs dont on ne parle pas assez.

Les motivations face à la réalité

Je pense que, comme beaucoup, j’ai voulu exercer auprès des chiens, les éduquer avec bienveillance, suite à l’éducation d’un chien de famille qui m’a initié et fait découvrir plein de pans de beau métier. Pourtant, une fois le pied dedans, notre expérience personnelle avec notre propre chien peut soudain s’éloigner parfois très loin de la réalité des faits.
Tout d’abord parce qu’éduquer son propre chien permet d’avoir un presque total contrôle sur tout ce qu’on veut mettre en place. Et qu’analyser et accompagner les problématiques de son propre chien n’est pas la même chose qu’accompagner les problématiques de centaines de chiens différents, d’humains différents, de mode de vie et de pensées différents.
Apprendre quelques tours à son animal est bien éloigné du fait d’accompagner un humain avec un chien agressif ou bien un chien terrorisé par sa propre ombre. 

Et justement en parlant d’humain, c’est surement l’élément majeur que vous accompagnerez dans votre métier. Pas le chien directement. Le chien passe presque « secondaire » et ça peut être déstabilisant quand on en a pas conscience. Si c’était ce qui vous motivez (de travailler vous même avec le chien), prenez le temps de vous re-questionner. En effet ce sont les gardiens du chien qui vont vivre avec et qui doivent alors apprendre ce qu’il faut faire ou ne pas faire dans le quotidien. Votre rôle est de tout transmettre.
Aussi se former pour accompagner l’humain, ses émotions, ses expériences, ses croyances devient essentiel et trop largement sous estimer. Faire face à toutes sortes de personnalités : travailleur de l’extrême, trop stricte, trop laxiste, manque d’écoute et de régularité, écoute de justement un peu tout le monde, stressé, traumatisé, curieux, perdu, en galère financière, peu de ressources disponibles, etc. 

Les aspects qui peuvent devenir une contrainte de vie

• Le regard des gens (professionnels ou non) et la satisfaction des clients

Suivant votre sensibilité, ce point peut vous impacter. Je vous enlève un poids : votre approche ne conviendra pas à tout le monde. Ce n’est pas grave, cela n’impacte pas obligatoirement la qualité de votre travail. Et en cas d’erreur de votre part, soyez simplement honnête (avec vous et votre client) afin de rebondir et que chacun se nourrisse de ceci telle une force.
Parfois, cela n’accrochera pas humainement, parfois ces humains ne seront pas prêts psychologiquement à ce moment T, parfois certains n’auront pas la motivation d’appliquer dans leur quotidien ce que vous travaillez avec eux en cours, etc.  Ce sera des déceptions humaines à gérer. Apprendre à lâcher prise là dessus est important, se remettre en question aussi et savoir se protéger émotionnellement surtout, même si ce métier nous fait rentrer en quelque sorte dans l’intimité de beaucoup de familles.
La récompense ? Tous ces magnifiques binômes qui saisiront pleinement vos conseils, vos exercices etc et qui évolueront positivement au fil des mois avec leurs chiens. Parfois la naissance de belles amitiés.

Les conditions de travail

C’est un métier d’extérieur, ce qui implique vivre au rythme des saisons. Quand il pleut, quand il neige, quand il faut chaud. Globalement, tant que chaque élément n’est pas dans des extrêmes, on bosse. On s’adapte aussi parfois avec des horaires particuliers quand il le faut. Aussi passer sa journée dehors dans le froid et la pluie en enchainant les cours, les rencontres, les réflexions et discussions, c’est épuisant. 

Les trajets

Educateur canin, très souvent, c’est travailler seul. C’est à dire : se déplacer toute la journée dans une zone plus ou moins large pour les rendez vous. Car même disposant d’un terrain, un bon éducateur à mes yeux ne se contente jamais de bosser sur celui-ci en majorité. Cela implique donc beaucoup de route. Les trajets de 30minutes en voiture dans le silence et les bouchons ne sont pas forcément un plaisir quotidien.

La multigestion

En tant qu’auto-entrepreneur, on gère tout seul. On s’occupe de la prise de rendez vous, de changer des rendez vous, de répondre à des questions, de gérer les appels, de gérer son site internet et ses réseaux, de gérer les finances, de gérer les suivi/question, de tout gérer tout seul.
C’est ainsi qu’après plusieurs rendez vous quotidien, trajet et bouchon, on risque d’avoir du retard sur l’aspect « contact » et d’avoir des gens qui ne comprennent pas. 

C’est avoir ponctuellement des horaires d’activité décalés à cause de la chaleur, à cause des problématiques rencontrées qui demandent adaptation, etc. Je suis rarement avant 20h chez moi et en arrivant, l’administratif reprend du service avant de m’occuper de ma vie personnelle. Ce pourquoi, après plus de 3 ans, je me force à adopter des changements d’organisation. Prendre soin de sa vie personnelle est important. 

Les responsabilités

C’est un métier qui peut être dangereux. Un métier d’extérieur sur terrain, un métier avec des animaux vivants pouvant causer des blessures. Et prendre soin de soi est primordiale car en cas d’incapacité physique, cela peut potentiellement impacter directement votre activité.
C’est un métier ou l’on peut faire le choix « d’utiliser » ses chiens pour travailler. Hors il est facile de tomber dans le piège de les utiliser tout le temps, de ne plus les protéger, de leur demander au delà de leurs propres limites. On leur en demande souvent beaucoup trop.
Une qualité est celle de garder la tête froide, même en cas d’urgence : chien qui fugue durant votre séance, bagarre, blessure, différents avec d’autres usagers, accidents, etc. Avant d’être professionnel, nous sommes humains et l’erreur peut arriver, même quand on travaille consciencieusement.

Les finances, formation et communication

Gérer les finances c’est savoir mettre de coté pour les stages. Ainsi que gérer son temps et s’organiser pour justement se dégager du temps. C’est un métier qui demande de se former régulièrement pour gagner en qualité. Et c’est aussi un métier aux revenus qui peuvent être irréguliers.

C’est aussi gérer sa clientèle : se faire connaitre, exercer un suivi, fidéliser, gérer sa communication autant sur internet que sur le terrain. Cela demande du temps et des compétences. C’est se démarquer tout en conservant ses valeurs et son identité. 

La vie personnelle

Tout ceci peut donc devenir une charge mentale importante à savoir gérer. Car travailler à son compte ne permet pas tout le temps de prendre des vacances comme bon nous semble. Enfin si, mais l’aspect financier en sera impacté et il faudra le prendre en compte. Cela impacte aussi le temps pour éduquer et profiter avec ses propres chiens, avec son/sa compagnon/compagne, ses enfants, ses parents, ses amis, etc. Néanmoins après 4 ans et peu de temps pour moi, j’ai choisi pour ma part de m’en octroyer plus, chose que je ne pouvais pas faire avant sans risquer de manger des patates tout le mois.

En conclusion, il ne faut pas réduire le métier d’éducateur canin au simple fait qu’on prend plaisir à découvrir et éduquer son propre chien (ou ceux des autres). D’ailleurs, bon nombre de collègues que j’admire pensent à s’arrêter. Cela amène à réellement se questionner et réaliser la charge que peut avoir ce métier passionnant.

Beaucoup de points négatifs, mais qu’en est-il des avantages ?

Il existe de nombreux articles parlant des aspects positifs de ce métier.
J’appuierais qu’une des gratifications de tous ces efforts est le bonheur d’aider des chiens de famille, des chiens recueillis ou autre à vivre en harmonie avec leurs humains et ce en diffusant des valeurs éducatives bienveillantes. On peut changer le regard des gens sur comment vivre avec l’autre et c’est à mes yeux, ce qui me touche. Ce métier m’a impacté même au délà des chiens, m’a re-questionné sur ma manière de vivre sur cette terre.

C’est un métier qui nous pousse a évoluer constamment, à apprendre chaque jour auprès d’êtres vivants qui seront tous passionnants à leurs manières (même ceux qui nous feront râler), a nous reconnecter à la Nature.

Pouvoir vivre globalement comme on l’entend, être fier de ce que l’on a construit, des relations que l’on créer entre chiens et humains mais également entre humains. Pouvoir redéfinir ce que l’on entend dans la pratique de ce métier tout en gardant des valeurs belles et solides.

Vous êtes toujours désireux d’en faire votre métier ? Direction cet article d’Amélie Clert qui vous donnera beaucoup d’informations sur les formations et divers métiers autour du chien qui s’offrent à vous : Comment devenir un professionnel du monde canin


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